La Péninsule de Paracas : entre déserts & sanctuaires marins
Lorsque nous arrivons à Ica au petit matin, depuis Arequipa et le canyon de Colca, après une nouvelle nuit passée dans le bus, il y a là un petit goût particulier : c’était notre dernier bus de nuit ! ! Pour marquer le coup (et surtout pour raisons de sécurité car la route traversait des montagnes et longerait des côtes), nous avons testé la « meilleure » compagnie de bus du pays : Cruz Del Sur. Niveau confort, aucune différence. Mais nous sommes arrivés, et c’est l’essentiel !
Cette partie du voyage a été réalisée en avril 2018
Ica est une grande ville sans intérêt dont la pollution, le bruit, les voitures et les tuk-tuk rappellent certaines villes d’Asie. Mais on ne vient pas ici pour Ica. Ce qui est intéressant ici, c’est la typologie si particulière de la région. La péninsule de Paracas, désertique, borde l’océan pacifique parcouru par les eaux froides du courant de Humboldt, offrant au passage une vie marine exceptionnelle. Ce courant, prenant source en Antarctique, est très riche en plancton, rendant la zone très poissonneuse, et attirant de ce fait de nombreux oiseaux et animaux marins.
La péninsule de Paracas offre donc un cocktail étonnant de dunes géantes, d’oasis, d’îles marines sanctuaires de vie marine, de terres désertiques ocres battues par le vent, et même un géoglyphe Inca ! Véritable destination « éco-touriste », ces sites sont pour la plupart protégés au sein de différentes réserves nationales.
Sommaire
Huacachina : son oasis et ses dunes géantes
Le paysage du littoral du Pérou est désertique, aride, sableux, certes. Mais c’est tout de même surprenant pour nous d’y trouver des dunes géantes, ainsi qu’une véritable oasis entourée de palmiers et de roseaux, la laguna de Huacachina.
Située à quelques kilomètres seulement d’Ica, cette oasis est constituée uniquement d’hôtels, d’agences et de restaurants disposé autour d’un petit lac (dont les eaux sont polluées). Les activités principales sont d’aller se promener dans les dunes à bord de buggy, de pratiquer le sandboard et d’observer les couchers de soleil. Présenté comme cela, ce n’est pas très attractif on en convient. C’est d’ailleurs probablement pour cela que la plupart des personnes ne restent que 24h sur place.
La légende veut que l’oasis naquit lorsqu’une belle princesse indigène s’y réfugia pour échapper à un chasseur. La végétation se serait alors développée dès lors qu’elle serait entrée en contact avec l’eau, l’origine des dunes s’expliquant quant à elle par les marques de plis laissées par le manteau de la princesse. Des rumeurs continuent encore aujourd’hui à maintenir l’histoire selon laquelle la jeune femme serait devenue une sirène continuant à nager dans les eaux du lac (source : Wikipedia)
Mais ce paysage de dunes digne du Sahara est tellement spécial et incongru dans cette partie du monde que cela mérite la visite ! D’ailleurs, on retrouve la photo de cet endroit au verso des billets de 50 Sol.
Nous avons testé le buggy et le sandboard (45 Sol pour 2 heures), avec départ en fin de journée pour assister au coucher du soleil. Et c’était génial ! Sensations fortes garanties… Les dunes sont tellement hautes que quand le buggy les redescendait, nous avions l’impression d’être dans un manège à la foire, avec les tripes et le cœur qui se soulèvent…
Quand au sandboard, nous l’avons fait allongé sur le ventre et honnêtement la sensation est également impressionnante. Julien était comme un gosse ! Elise qui aime bien moins la vitesse n’hésitait pas à freiner avec ses pieds mais s’est quand même jetée… au sable :) Un très bon moment pour tous les deux !
Enfin, mention spéciale pour le coucher de soleil que nous avons vu depuis le haut des dunes ! Sublime…
Et nous n’échappons pas au paradoxe du touriste…
Le village de Huacachina est cernée par des dunes gigantesques et un désert à perte de vue. En consultant la page Wikipédia qui lui est consacrée, on apprend entre autres qu’en 1999, ce village comptait seulement 115 habitants.
Aujourd’hui Huacachina est exclusivement tourné vers le tourisme. Résultat : derrière ce paysage de carte postale incroyable se cache une triste réalité écologique et économique qui nous dérange : des tas de déchets sous le sable, l’eau de l’oasis dégage parfois une odeur nauséabonde, les dunes regorgent de bouteilles en plastique et sacs. Mais aussi, et nous y avons participé, l’activité principale de Huacachina est de parcourir les dunes du désert à bord de Buggy à toute balle, véritable désastre en terme de pollution sonore qui fait perdre à ce lieu tout son charme…
Par ailleurs, des puits ont été installés par des entreprises privées aux alentours de l’oasis avec comme conséquence la réduction considérablement le niveau d’eau du lac, les eaux souterraines étant drainées par les puits. Pour compenser cette perte d’eau et conserver l’attrait touristique du lagon, les services publics ont commencé à créer un nouveau puits profond de 80 mètres pour générer un approvisionnement régulier en eau dans les années à venir… Que dire de plus…
Les îles Ballestas
Cette fois-ci nous y sommes : la mer (ou plutôt l’océan, déformation du vocabulaire quand on est Normands ^^) ! Nous ne l’avions pas vu depuis Valparaiso et elle commençait à nous manquer.
Les îles Ballestas sont situées à 40 minutes au large de Paracas, et sont connues pour leur… guano ! (vous commencez à en sentir l’odeur là ?) Car le guano (du quechua wanu, excrément) est un des meilleurs engrais « organiques » au monde. C’est encore ce fameux courant de Humboldt qui attire plancton, poissons, et des oiseaux donc ! Et comme ils se remplissent bien la panse, et que le climat désertique ne produit pas de pluie susceptible de « laver » le guano, et bien vous obtenez un joli tas de merde qui se vend à prix d’or !
Cette ressource très convoitée fut donc exploitée par l’homme dès 1870. Au 19ème siècle, le guano constitue un véritable poumon (oui oui parce qu’on le sent à plein poumon…) économique pour le Pérou. Au début de son extraction, la couche de guano mesurait plusieurs mètres d’épaisseur, jusqu’à 30 mètres sur l’île Chincha !
En 2009, le Pérou prend conscience des problèmes de sur-exploitation de cette ressource, mais aussi des effets indirects que la modification de l’écosystème marin (surpêche, El Nino) peuvent avoir sur la population d’oiseaux (et donc la production…), et constitue une réserve naturelle avec 22 îles et îlots et 11 pointes de guano. Cette réserve est considérée comme essentielle pour la recherche scientifique et la conservation de milliers d’espèces marines côtières. Elle assure également l’utilisation durable de diverses ressources au profit de la population locale. L’exploitation du guano est désormais encadrée (environ 2000 tonnes extraites tous les 5 à 7 ans). Il n’est pas permis aux touristes d’aller sur les îles, afin de ne pas perturber la faune. Nous y sommes allés en excursion en bateau (2h, 25 Sol par personne + 5 Sol de droit d’entrée pour la réserve maritime + 11 Sol de droit d’entrée pour la réserve naturelle de Paracas).
Arrivée aux îles, le spectacle est magnifique. Des oiseaux partout, sur les falaises et au dessus de nos têtes. Des milliers d’oiseaux ! Et du guano à tout va, d’ailleurs certaines personnes de notre bateau en fait les frais. Pas nous ouf ! :) Et on peut vous dire que l’odeur est bien là !
Véritable réserve ornithologique, ces îles hébergent notamment une espèce en voie de disparition, le Manchot de Humboldt, qui ne mesure pas plus de 60cm. Elles sont aussi peuplées de lions de mer aux rugissements incroyables, de fous variés, de cormorans des Bougainville, de cormorans de Gaimard, de sterne inca, de pélicans, et autres producteurs de guano.
Nous ne sommes restés que 30 minutes sur place, trop court encore une fois, mais le spectacle valait vraiment le coup !
Sur la « route » du retour, on passe devant le fameux « Chandelier ». C’est un géoglyphe de grande dimension (un peu comme les lignes de Nazca), dont l’origine, l’ancienneté et la signification sont encore un mystère. Serait-ce la représentation d’un bâton de Viracocha, dieu de la mythologie inca et pré-inca ? Serait-ce le motif de l’arbre-monde mésoaméricain ? Toujours est-il que cette importante figure est observée uniquement depuis la mer, l’accès par la terre étant interdit.
La réserve nationale de Paracas
La réserve nationale de Paracas est une zone protégée depuis 1975 et s’étendant sur 335 000 ha (terre et mer). La réserve dispose de superbes plages (mais pas pour la baignade) et de bords de mer abrupts aux couleurs jaune-brun-ocre, lié à l’activité volcanique de la région. Ce contraste est vraiment étonnant. Et si vous vous demandez comment un désert peut se trouver « en bord de plage » : les courants froids génèrent peu d’évaporation, du coup il ne pleut pas et rien ne pousse. Ajoutez à cela des vents constants qui balayent tout…
Il existe plusieurs possibilités pour visiter cette réserve : y aller en bus avec une excursion ou bien y aller en vélo. Mais tenant compte du fait que le vent est très fort dans cette zone, que le terrain n’est pas tout à fait plat, et que nous avions seulement 4 heures devant nous avant de reprendre le bus pour Lima, nous avons décidé de le faire en excursion (4h, 20 Sol par personne + 11 Sol de droit d’entrée, réduit à 6 Sol en cas de balade en bateau le matin). C’est notre dernier « tour » du Pérou !
Au début de la réserve se trouve un musée (payant) sur les civilisations anciennes, et un centre d’interprétation de la réserve (qui lui est compris dans le billet d’entrée de la réserve) sur la géologie et la faune locales. Non loin de là, un chemin mène à un observatoire de flamands roses, mais de très loin (gros zoom ou jumelles nécessaires). L’excursion se poursuit en direction de la playa roja, une plage rouge uniquement accessible aux pécheurs locaux. Le rouge du sable est lié à la roche qui s’est érodée avec le vent et la mer. Nous y avons passé 10 minutes montre en main.
Puis direction les quelques restaurants qui se trouve à côté d’un petit port de pêche (encore une fois, seuls les locaux ayant une autorisation peuvent pécher ici). Bien entendu, le but est que les touristes y mangent. On dit que le poisson est frais ici, mais comme il n’y a pas d’électricité on se demande comment il est conservé… Nous avions nos sandwichs et avons préféré nous poser au soleil sur la plage juste à côté. Enfin, nous avons fini cette excursion à la « cathédrale », formation rocheuse, un peu comme à Etretat, mais qui n’en est plus une puisqu’elle est tombée il y a quelques années. Encore une fois, petite frustration d’être restés seulement 10min sur place montre en main devant un aussi beau paysage…
Bilan du « tour » : un peu déçus. Clairement si on a du temps et de l’énergie, on recommande de le faire en vélo. Après il faut garder en tête que c’est un endroit littéralement désertique, avec beaucoup de vent, et que les paysages offerts sont similaires à d’autres endroits tels que San Pedro de Atacama ou en Bolivie.
Nous avons ensuite repris notre bus pour Lima, dernière étape au Pérou !
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