Santiago du Chili et l’histoire du pays

Santiago du Chili et l’histoire du pays

Nous sommes arrivés à Santiago depuis Pucón au petit matin, via un bus de nuit. En arrivant au terminal à 6h30, difficile d’avoir une super vision de la ville. Comme notre auberge est à 20-30 minutes de marche de là, nous partons à pied, en traversant des rues pas très accueillantes.

Nous avions prévu de passer deux jours et une nuit à Santiago. Nous n’avions pas eu d’échos très positifs sur la ville, du coup nous ne nous sommes pas trop mis la pression pour parcourir la ville en long, en large et en travers. Mais ce que nous avons vu nous a suffit, bien que nous aurions pu rester une journée de plus.

Nous avions décidé de « rentabiliser » ces deux jours en faisant deux « free walking tour » différents, une grande première du coup car nous sommes toujours passés à côté dans les villes que nous visitions. C’est une bonne façon de découvrir une nouvelle ville et d’en apprendre plus avec un natif des lieux. Il s’agit en général d’étudiants passionnés par leur ville qui font ce job pour se faire un peu d’argent. Cela permet également d’avoir de bons conseils sur les lieux où aller et les spécialités, et de découvrir des endroits que nous n’aurions pas forcément vus par nous-mêmes. Après, il faut le dire, tout dépend du guide sur lequel on tombe, mais globalement c’est pas mal.

Par contre, « free walking tour » n’est pas vraiment le terme approprié… En effet dès le début du tour, le guide demande un pourboire à la fin, et donne même une fourchette de ce qu’il voudrait. Le premier nous a demandé entre 5000 (6,50€) et 10000 (13,5€) pesos chiliens par personne. Le lendemain, l’autre guide, nous a demandé entre 8000 (10,5€) et 12000 (16€) pesos chilien… C’est un peu « capillo tracté » dirons nous.

Rares sont les capitales qui abritent 1/3 de la population du pays, mais Santiago en fait parti. L’exode rural massif depuis 1865 et le boom économique, notamment avec la forte industrialisation des années 50 et 60 ont bouleversé les grands équilibres démographiques. Les bidonvilles sont apparus dans les quartiers périphériques. De nos jours, le grand Santiago s’étend sur près de 35km du Nord au Sud et de 40km d’Est en Ouest. Au final le Chili c’est des millions d’hectares déserts de toute population et des encombrements monstres dans le centre de Santiago…

Deux petits tours et puis s’en vont

Culture et histoire

Le premier jour de visite du centre ville était concentré sur les bâtiments historiques et l’histoire du pays.

Départ au Museo Nacional de Bellas Artes. Fondé en 1880, c’est le premier musée au Chili, et l’un des plus anciens d’Amérique du Sud. Puis direction la magnifique Plaza de Armas. Celle-ci a été fondée en 1541 et est le berceau de la ville de Santiago. Autour on retrouve la Iglesia Catedral, le Palacio de la Real Audencia abritant le Museo historico nacional, la Municipalidad, le palais de l’archevêque et le monument aux peuples indigènes. C’est le cœur de la ville ici, toujours animé avec des marchands ambulants, des musiciens, des danseurs, des joueurs d’échecs, des cireurs de chaussures, des caricaturistes. La place est bien verte et abrite des jets d’eau.

Nous passons dans l’un des bâtiments abritant plein de fast food chiliens, à savoir les completo. Ce sont des hot-dog mais avec du choux ou bien des tomates en dés et du guacamole. Etonnant !

Puis nous avons pris le chemin vers le Antigua Congreso (l’ancien congrès), le palais de justice, la Plaza Constitution et le Palacio La Moneda (siège de la présidence du Chili) pour la minute « Histoire du Chili » (voir ci-après). La Bolsa de comercio (la bourse) et enfin le Centro Culturel Gabriela Mistral (GAM). Pinochet en avait fait son ministère de la défense, Michèle Bachelet l’a (re) transformé en Centre multiculturel accueillant toutes formes d’art.

Marchés et lieux insolites

Le second tour était plus une immersion dans les marchés locaux et au cimetière de la ville.

Tout d’abord, le Mercado Central. Celui-ci est situé dans un bâtiment de style Art Déco datant de 1868 et déclaré Site du Patrimoine Culturel de l’UNESCO. Initialement, il était conçu pour accueillir des expositions. Ce marché est réputé pour ses poissons et produits de la mer, dont certains ne peuvent être trouvés qu’au Chili ! Pas de surprise donc que National Geographic l’ai inclus dans son Top 10 des marchés du Monde.

Nous avons continué avec d’autres marchés de viandes, fruits et légumes et avons ainsi pu faire quelques petites emplettes gourmandes.

Cette visite s’est clôturée en prenant un métro direction… Le cementerio general ! 86 hectares de tombes, de mausolées et de columbariums. Ce n’est pas le genre d’endroit que l’on pense visiter pour ses vacances, mais c’est intéressant à voir.

Il a été crée en 1819 est une véritable ville avec les quartiers des pauvres et les quartiers des riches avec des mausolées immenses laissés à l’abandon au milieu d’une végétation luxuriante. Une chose qu’on n’a pas l’habitude de voir en France : les « immeubles » de tombes. Des rangées de tombes empilées sur plusieurs étages, avec juste une plaque devant. Les plus pauvres peuvent même « louer » un emplacement à une autre famille. Les dépouilles les plus vieilles sont « rassemblées » dans des « boites » plus petites qu’on pousse vers le fond, pour faire de la place aux autres.

Les familles viennent régulièrement garnir les tombes de leurs proches, ce qui en fait un endroit coloré et vif, contrairement à ce que l’on pourrait croire.

Les Chiliens ont un rapport à la mort différent du nôtre. Ils n’hésitent pas à apporter des cadeaux pour les tous événements de l’année et ainsi inclure les défunts dans les événements joyeux de la vie. Bien souvent pour les anniversaires, la famille se réunie autour de la tombe et trinque ensemble à la mémoire du défunt. Les tombes des enfants sont souvent recouvertes de peluches, de guirlandes de noël, de fleurs et autres cadeaux. C’est assez troublant de traverser les cimetières et de voir tout cela.

Par ailleurs, certains défunts sont glorifiés et vus comme des « saints » porteurs de chance. Les gens viennent faire une prière et si leur vœu se réalise alors ils apportent une offrande et se promettent de revenir l’année suivante. Certains défunts aux histoires tragiques (par exemple des enfants) sont très « connus » et reçoivent de nombreuses cartes de remerciements…

Nous avons conclu ce free walking tour autour d’un verre de terremoto. Comme son nom l’indique (terremoto veut dire “tremblement de terre”), c’est une boisson qui va vous secouer ! Il s’agit d’un cocktail fait avec du vin, du pisco, et de la glace à l’ananas (parfois aussi de la grenadine). Pas hyper bon et très sucré. Mais parfait pour les étudiants !

L’histoire ambigüe du Chili

Nous n’avons pas eu le temps d’aller visiter le musée de la mémoire qui relate de l’histoire du Chili, mais nous avons remués nos vieux souvenirs de cours d’histoire sur le Chili lors de ces deux jours, en particulier sur Allende et la dictature de Pinochet, vraiment très intéressant.

Quelques bases pour ceux du fond

On va pas vous faire une dissert’, mais rappelons quelques bases (merci Wikipedia !) : Le mardi 11 septembre 1973, le gouvernement du président démocratiquement élu Salvador Allende (Socialiste) a été renversé par un coup d’État militaire.

Ce coup d’État a largement été soutenu par les États-Unis (administration Nixon), qui étaient hostiles à Allende. Ils y voyait l’émergence d’un second régime marxiste dans leur zone d’influence, et voulaient contrer l’expropriation des grandes compagnies américaines du cuivre. Il est aujourd’hui établi que la CIA a participé à la déstabilisation du régime chilien en vue de fomenter un coup d’État. En particulier, la CIA a soutenu financièrement la grève des camionneurs qui paralysa le pays en octobre 1972.

Le coup d’État fut planifié par les commandants en chef des trois armées et le chef de la police, et dirigé par le général d’armée Augusto Pinochet. Le « coup » s’est lancé depuis Valparaiso, ville importante pour l’armée (navale) chilienne.

Le 11 Septembre, assiégé dans le palais de la Moneda par l’armée, Allende refuse de fuir. Le palais fut bombardé par l’armée de l’air, et Allende fut retrouvé mort. La version officielle parle d’un « suicide ».

À la suite du coup d’État, la junte militaire prononça la dissolution du Congrès National, des conseils municipaux, des syndicats et des partis politiques. La liberté de la presse fut abolie, le couvre-feu instauré. Toute forme de littérature rattachée au socialisme fut interdite et les opposants au régime arrêtés, exilés, torturés ou exécutés. La dictature militaire dirigea le pays jusqu’en 1990.

Aujourd’hui, une population partagée

Aujourd’hui encore, des familles recherchent les disparus qui ont été jetés depuis des hélicoptères dans le désert de l’Atacama ou dans l’Océan Pacifique, dans l’espoir de les retrouver vivants ailleurs ou bien de récupérer les corps et faire leur deuil.

Pourtant, lorsque les locaux (nos guides principalement) en parlent, ils font clairement état d’un clivage assez marqué (50/50 ?) de la population sur cette période. D’un côté les « pro-Pinochet », qui voient en cette personne un « sauveur » (il a réussi à relever le pays de la crise), et de l’autre évidemment les autres, ceux dont les familles comptent de nombreux disparus.

Tout cela n’est pas aidé par le fait que Pinochet, inculpé de « génocide, terrorisme et tortures », est mort en décembre 2006 à l’âge de 91 ans, sans jamais avoir été jugé. De plus, il n’y a pas eu de phase de « purge » à la fin de la dictature, et de nombreux personnes impliquées dans la dictature sont toujours en fonction dans des postes importants de l’administration…

D’ailleurs, les instituteurs aujourd’hui n’ont pas le droit de parler de dictature, mais de « régime militaire ». Une de nos guides, française, (plus tard à Valparaiso) nous expliquait même avoir été « embêtée » par la police lors de l’un de ses tours (son discours a été jugé comme propagande)…

Plusieurs films nous ont été recommandé pour en savoir plus sur cette période :

  • Missing, fondé sur l’histoire vraie d’un journaliste américain, Charles Horman, ayant disparu à la suite du coup d’État (1982)
  • No, qui évoque la participation d’un jeune publicitaire à la campagne en faveur du « non » lors du référendum chilien de 1988 (qui vit la fin de la dictature) (2012)
  • Le Bouton de nacre, film documentaire chilien, basé sur le thème de l’eau, décrivant l’histoire des Amérindiens de Patagonie massacrés et déculturés durant la dictature (2015)
  • Colonia, thriller racontant l’histoire d’un couple qui se retrouvent entraînés dans le coup d’État militaire chilien en 1973 (2016).

Deux infos supplémentaires pour la route !

Nous avons appris deux choses intéressantes au Chili.

Premièrement, les tremblements de terre : il y en a environ un par semaine, mais c’est rien ! C’est comme une bonne averse en Belgique, ça ne choque personne ! Il faut donc apprendre les gestes qui sauvent (au cas où) à base de triangle de survie : en gros, il faut se mettre à l’abri, si possible sous une table. Le dernier gros séisme date de 2010, et c’est environ tous les 10 ans… Donc si vous voulez une expérience inédite, allez au Chili en 2020 ! ;)

Deuxièmement, les araignées : il y en a un type qui s’appelle l’Araña de Rincón. Elle se balade un peu partout dans la maison et sa toute petite particularité c’est qu’elle est mortelle ! Il faut donc ne jamais marcher pied nus, toujours secouer ses vêtements et ses chaussures avant de les enfiler etc… C’est sympa non ? :)

A la fin de la deuxième journée à Santiago, nous reprenons la direction du Terminal de bus pour aller à Valparaiso. Ce fut un séjour intéressant mais ce n’est pas une capitale coup de cœur tout de même.

2 réflexions sur « Santiago du Chili et l’histoire du pays »

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