A la rencontre des nomades de Mongolie

A la rencontre des nomades de Mongolie

6h50, dimanche 23 juillet, nous débarquons du transmongol à Oulan-Bator. Notre guide (Byamba) nous attend sur le quai de la gare, c’est rassurant mais aussi très bizarre d’être pris en main, nous qui aimons notre liberté à découvrir les choses et à crapahuter. Nous voulions initialement faire un trek à cheval, mais par manque de temps nous avons décidé de faire une immersion dans une famille nomade (nous sommes donc passés par une agence).

Découverte de Oulan-Bator

Direction l’hôtel (une chambre luxueuse comparé à ce que nous avons eu depuis notre départ), une douche bien méritée, puis visite de la ville.

Au programme, un des plus vieux centre bouddhiste mongol (ayant survécu aux années de socialisme), le musée national, une galerie d’art mongole. Notre guide nous explique l’histoire du pays, où Genghis Khan est une véritable légende, et où les russes ont « permis » à la Mongolie de prendre son indépendance. Le soir nous assistons à un spectacle d’arts mongols vraiment impressionnant avec costumes, danses traditionnelles et chants diphoniques.

Nous reviendront en fin de semaine à Oulan-Bator pour visiter le « black market », un immense marché où on trouve tout et n’importe quoi. Notre guide nous emmène à l' »incontournable » boutique de cashmire (la Mongolie est le 2ème producteur au monde, ce qui semble poser des problèmes environnementaux avec un accroissement de la désertification des steppes). Puis le « final » un peu glauque à notre goût au mémorial qui surplombe la ville en l’honneur des Russes qui, après avoir délivré les Mongols des mains des japonais et des nazis, apportent symboliquement paix et progrès…

La Mongolie est connue pour avoir la plus faible densité de population du monde. Rien n’y parait dans la capitale Oulan-Bator… Circulation infernale, centre commerciaux et constructions à tout va… La ville n’a selon nous que peu d’intérêt.

Le Naadam

Nous sommes arrivés juste après la fête officielle du Naadam à Oulan-Bator (13 Juillet). A date fixe dans la capitale, cette fête très importante pour les mongols est célébrée à des moments différents durant tout juillet selon la province ou les familles. A cette occasion, des jeux sont organisés : combats de lutte, courses de chevaux et concours d’archers. C’est aussi l’occasion pour les familles et les amis de se retrouver et faire la fête ensemble autour de bons mets typiques comme les khuushuurs (chaussons de moutons) et de quelques bouteilles de vodka.

Immersion dans une famille nomade

Nous étions pressés de partir rejoindre notre famille d’accueil. L’idée du séjour était de s’immerger dans la vie des nomades mongols, de partager leur quotidien : traire les vaches et juments, attraper les veaux et tenir les poulains, emmener les moutons et chèvres aux pâturages à cheval, ramasser les bouses de vaches pour le feu, chercher l’eau en chariot, préparer le thé mongol et plats régionaux, confectionner les produits laitiers (airag – lait de jument fermenté, tarag – yaourt, aruul – fromage sec et sucré, etc.)

Notre famille ne se trouve pas très loin d’Oulan-Bator (une heure de route environ), mais déjà les paysages sont impressionnants. Ayant changé d’emplacement 3 jours auparavant pour leur pâturage, la femme de la famille avait donné rendez-vous au conducteur près de l’unique route centrale afin de nous emmener au camp. Il nous a fallu deux arrêts et plusieurs coups de téléphone pour se retrouver dans cette steppe, tellement grande… c’est magnifique.

Nous voyons des campements de yourtes au loin. Finalement nous arrivons à un campement de 4 yourtes, où nous passerons la semaine. Trois yourtes appartiennent à notre famille d’accueil : une pour eux, une pour nous (et notre guide), une troisième qui sert de stockage. La quatrième héberge la belle famille de nos hôtes. Nos hôtes, Chimgee (la femme) et Baldan (le mari) gardent leur 3 petits-enfants venus en vacances chez eux (selon notre guide il est primordial pour eux de passer du temps à la campagne, manger des produits laitiers et respirer le grand air pour survivre à l’hiver rude à venir) ainsi que leur dernière fille de 12 ans (qui le reste de l’année habite avec sa sœur à Oulan-Bator pour pouvoir aller à l’école).

L’hospitalité mongole

Nous avions lu beaucoup de choses sur la légendaire hospitalité mongole. Et bien nous vous confirmons que ce n’est pas une légende ! A peine arrivés au campement, nous sommes accueillis avec du lait salé, du pain et du urum (crème de lait que l’on met sur le pain). Nous découvrirons par la suite que chaque personne entrant dans une yourte est accueillie par ce rituel. Beaucoup d’invités sont arrivés à l’improviste lors de notre séjour et chaque fois Chigmee préparait un repas ou proposait de se reposer dans la yourte voisine. Tout cela s’inscrit dans la vieille tradition qui veut que les mongols s’entraident pour leur survie mutuelle quand ils traversent leurs vastes contrées à cheval.

Nous faisons donc connaissance avec la femme et des enfants, Baldan (le mari) n’est pas la car il est parti chercher des poulains qui n’ont pas suivi le bon troupeau dans la steppe. Nous ne savons pas trop comment nous comporter. Puis nous préparons le déjeuner avec Chimgee. L’après-midi nous nous promenons sur les collines environnantes. Le calme et la beautée du paysage sont très ressourçant, mais le fait d’avoir un guide constamment avec nous est un peu déstabilisant… En fin d’après-midi l’orage gronde, il commence à pleuvoir.

Nous goutons le tarag maison (yaourt fait à partir du lait). Puis nous jouons avec les enfants au Shagai (un jeu avec des os de cheville de mouton) et préparons le diner. Il pleut toujours mais nous allons aider pour la traite des vaches. L’orage est au dessus de nous. Elise rentre se mettre à l’abri car elle a vite froid mais Julien brave la pluie, se faisant tremper mais appréciant cet instant sauvage, avec d’impressionnants éclairs qui déchirent le ciel, faisant peur à tout le monde à chaque fois.

Au coucher, il fait nuit noire, c’est troublant. Le ciel s’est dégagé et les étoiles font leur show… Il a plu toute la nuit. Quand nous nous sommes réveillés le ciel était toujours très menaçant. Nous avons petit-déjeuné à l’occidental dans notre yourte mais Chimgee nous a amené gentiment de la crème de lait à mettre sur notre pain. Elise adore ça, ça lui rappelle un peu la Normandie :) Elle en a d’ailleurs mangé toute la semaine, un vrai régime « blanc » !

Nous nous attendions à une immersion totale, et sommes un peu déçu lorsque l’on comprend que nous vivrons plutôt « à coté » que « avec » la famille : dans notre propre yourte, nous préparerons notre propre nourriture. Pas de ramassage de bouses pour chauffer le poêle (même si Julien a testé), nous utiliserons un camping gaz ; la nuit tombée, pas de bougies mais une lanterne branchée sur batterie ! Après une discussion avec le guide, nous tombons d’accord sur le fait de partager nos produits avec ceux la famille pour faire des plats typiques mongols le midi, et le soir nous mangeons de notre coté.

Des journées réglées par les troupeaux

Les journées se déroulent ainsi : vers 6-7h le matin, traite des vaches (certaines familles traitent aussi les juments, 6 à 8 fois par jour), aller puiser l’eau au puits. Il faut pour cela rassembler le troupeau, nous courrons derrière les bêtes en criant pour les rassembler. Un peu de légèreté et d’exercice nous fait le plus grand bien ! On se rend compte que ça court vite une biquette ;) Il faut aussi éviter que les troupeaux se mélangent, notamment au puits (toutes les bêtes du coin rappliquent !). Puis vient la préparons du déjeuner. L’après-midi s’étire, avec quelques tâches diverses, jusqu’à la traite du soir, le diner et le coucher.

Les mongols vivent pour et grâce à leurs bêtes. Ils vivent de leur viande, du lait et de ses dérivés, de leur peau et lainage qu’ils vendent ou utilisent. Les bouses de vaches séchées sont leur unique (et excellent) combustible pour le poêle (et sans odeur :) ) !

La cuisine mongole

Rapidement Elise s’intéresse à la préparation des plats, et Chimgee n’hésite pas à la faire participer. On nous avait dit que la nourriture nomade n’était pas très bonne, pourtant nous on s’est régalé. Il est vrai qu’au bout d’un moment, ça devient monotone : de la viande (principalement du mouton), des préparations diverses à base de farine (pâtes, sortes de crêpes), et préparations à base de lait et ses dérivés.

Boire du lait de jument fermenté (airag) a été une expérience assez typique et insolite !

N’hésitez pas à consulter notre article sur les plats que nous avons rencontré.

La yourte, bulle de (sur)vie

Il est dit que 3 hommes peuvent monter une yourte en 30 minutes. Il faut dire qu’il n’y a aucun abris dans la steppe, la yourte (qu’on appelle aussi ger)est le seul refuge contre le vent, la pluie, le soleil ou la neige. Elle est composée d’un « mur » (un treillage en bois) circulaire, d’un pilier central avec deux montants, et de longues tiges en bois (représentant la femme et l’homme) qui reposent sur ces deux éléments pour former le toit. Puis l’ensemble est enveloppé de couches de feutres en laine et de tissus en coton. En fonction des saisons ils rajoutent ou enlèvent des couches.

Nos hôtes ont démontés la leur pour changer une partie du mur, ça nous a pris plus de deux heures ;) Julien a été d’un aide précieuse pour eux : grâce à sa taille, il a pu sortir les mains par le haut de la structure pour ajuster les différentes couches de laine et de draps.

Les yourtes sont vraiment étonnantes. De l’extérieur, elles ressemblent à de grandes cabanes blanches, comme de grandes tentes de camping. Mais quand on rentre dedans par cette porte en bois souvent décorée, on entre dans un univers insoupçonné. A gauche et à droite : deux lits. au fond, une commode avec des photos posées dessus, une horloge, un miroir, une télé même ! Un peu devant, une table et des tabourets, et au milieu un poêle pour se chauffer et cuisiner. Au sol, du linoleum. Les lits servent pour s’asseoir le jour, cuisiner dessus aussi, et dormir la nuit à plusieurs dessus. Les visiteurs entrent sans frapper et doivent normalement s’installer sur le lit de gauche.

Baldan nous a emmené avec lui pour une « tournée » de différents camps. Arrivés à l’improviste, l’accueil des nomades n’a pas failli. A chaque fois nous sommes reçus avec lait et nourriture, pendant que Baldan discute. Nous avons même été invité à rester avec une famille qui tenait une cérémonie en l’honneur de la première coupe des cheveux d’un petit garçon de 3 ans. Un lama (prêtre bouddhiste) est venu spécialement pour l’occasion, et plusieurs membres de la famille étaient présents. Faute de temps, nous n’avons pas pu rester mais avons pu voir les préparatifs ainsi que la traite des jument et gouter à leur lait fermenté.

Les yourtes sont utilisées aussi bien dans la campagne que dans la ville ! Contraste encore en tradition et modernité.

Chevauchée fantastique ?

Nous voulions tout de même monter à cheval durant notre séjour, perpétuer cette tradition ancestrale, et partir à la journée découvrir les paysages. Bon ça c’était le plan initial. Déjà, notre « guide » équestre, le fils de 16 ans de la belle famille, a eu du mal à attraper deux chevaux… (c’était d’ailleurs très impressionnant, car les chevaux sont en liberté et il doit les attraper avec une sorte de lasso au bout d’un grand bâton). Nous montons donc à tour de rôle.

Premier contact avec la bête : une belle selle mongole en bois. Le premier essai laisse ses marques : bleus aux cuisses pour nous deux, Julien s’écorche la peau des fesses au coccyx à cause du frottement…

Le lendemain, deuxième essai, cette fois-ci avec deux chevaux (dont un emprunté à un campement voisin), et une deuxième selle, occidentale ! Beaucoup plus confortable, malgré des étriers trop courts pour les grandes jambes de Julien. On rajoute une couverture sur la selle mongole pour Elise, c’est mieux mais c’est toujours pas ça… Julien gère son cheval, mais celui d’Elise est pris à la bride, du coup elle à la jambe collée à l’autre monture, ça cogne et ça frotte contre les lanières en cuir… Après 2 heures, on a vraiment mal partout.

Troisième jour : ce devait être une sortie à la journée, mais vu les deux derniers jours (et nos vives courbatures), notre enthousiasme n’est pas au top. On rajoute une deuxième couverture sur la selle d’Elise, elle commence à trouver ça confortable ;) Un autre jeune nous accompagne cette fois, les deux chevaux à la bride. Pour la chevauchée folle les cheveux au vent, on repassera ;) Finalement après une heure de ballade, une météo menaçante nous fait rentrer.

Il faut quand même savoir qu’ici les gamins sont sur des chevaux dès le plus jeune age. Impressionnant de voir un jeune de moins de 10 ans attraper l’encolure d’un cheval, monter dessus d’un bond, et partir à cru au galop sans sourciller.

Le paysage et la faune

Nous avions déjà eu un magnifique aperçu du paysages mongols en arrivant par le nord depuis Irkoutzk avec le transmongol. A une heure de Oulan-Bator, vers le Sud, le paysage est plus vert, vallonné, immense et paisible. Des troupeaux de vaches, chèvres, moutons et chevaux sont en liberté ici, et cohabitent. Il faut parfois séparer les troupeaux pour ne pas qu’ils se mélangent.

Pas de routes mais des pistes. Ici et là, des totem bouddhistes, amas de pierres avec un bâton au milieu recouvert de bandes de tissus de toutes les couleur. La croyance veut que l’on tourne trois fois autour en jetant des pierres.

Un immense bruit au loin, c’est un troupeau de chevaux qui galope pour aller s’abreuver au puits. Incroyable beauté de la nature. Les chèvres deviennent notre réveil matinale. Il n’y a pas de poules, elles ne survivraient pas à l’hiver. Sur le sol, des excréments d’animaux se mêlent aux os d’animaux, sans déranger qui que ce soit. Les animaux qui meurent ici se font dévorer par les rapaces. De petites marmottes ou souris (on ne saura pas vraiment) couinent sans cesse à notre approche, sortant la tête de leurs galeries souterraines. Parfois l’une d’entre elles se fait niaquer par le chien du camps.

Le climat est très changeant. On a pu se réveiller avec un magnifique ciel bleu, puis le vent se lève, le midi les nuages apparaissent, deviennent progressivement menaçant pour finir en orage le soir. Le tout avec grâce et beauté, en prenant son temps.

Photo finish

La veille de notre départ, nous souhaitions faire des photos avec nos hôtes, et ils ont été adorables puisqu’ils se sont habillés en costumes traditionnels pour l’occasion, et nous ont même prêté des « dals ». On les a bien fait rire lorsqu’on a enfilé ces robes en tongs, alors qu’ils portent tous des bottes montantes ;)

On reste étonné par le mélange de tradition et de modernité. Pas de douche dans les yourtes mais la télé satellite qui fonctionne sur batterie et panneau solaire. Les motos partout semblent avoir en partie remplacé les chevaux pour aller récupérer le bétail. Dans les mains des visiteurs, qui arrivent à bord de rutilants SUV, des téléphones dernier cri. A la TV, on se passionne autant pour les courses du Naadam que pour des soap opéra coréens…

Ce qui dérange surtout, c’est la présence constante de déchets : vieilles bonbonnes de gaz rouillées, bouteilles en verre vides… Les déchets sont brulés sur place, lorsqu’ils ne finissent pas par terre tout simplement.

Cela n’enlève rien aux paysages incroyables apportant plénitude et sérénité, à leur hospitalité (parfois perturbante pour nos habitudes occidentales), et à leur gentillesse débordante malgré des conditions de vies rudes et difficiles. Ici comme au lac Baïkal, on se demande vraiment ce que ça donne en hiver…

5 réflexions sur « A la rencontre des nomades de Mongolie »

  1. Julien sur un petit cheval long : s’il n’avait pas les fesses un peu douillettes, au bout de combien de temps se serait-il retrouve à porter le cheval ?
    Ceci dit ; les paysages sont magnifiques et la gentillesse des Mongols tranche avec la rudesse des conditions de vie.
    Merci de nous faire partager vos découvertes !
    On aimerait en savoir plus sur vos états d’âme ; quand on se confronte à des gens dont l’objectif quotidien est la subsistance, cela ne fait-il pas s’interroger sur notre mode de vie occidental ?

    1. Pour le cheval, au troisième jour, à mi-chemin, ma monture s’est arrétée subitemment, pour se mettre au sol, comme s’il voulait dire « ça suffit maintenant! ». Mais il est vite reparti cela dit 🙂 (heureusement car je savais pas trop quoi faire).
      Il est clair que le mode de vie nomade est tellement éloigné du notre qu’on ne peut que s’interroger… Ils se contentent de si peu, et pourtant semblent tout à fait heureux. Après le mode de vie nomade, bien que majoritaire (2/3 de la population), est en baisse. Maintenant qu’on vit qu’avec un sac sur le dos, on apprends à apprécier l’essentiel : un lit confortable, des douches chaudes ! Mais aussi la famille et les amis 😉

  2. Bonjour,
    J’aimerai aller découvrir la Mongolie l’été prochain et surtout passer une semaine avec les nomades.
    Quelle était votre agence ? Croyez vous qu’à chaque fois, les visiteurs mangent leurs produits ?

    Merci !

    1. Bonjour ! Super projet, et magnifique destination !
      Notre agence était Mongolie Evasion. Toutefois, si nous devions le refaire, nous ne passerions pas par une agence, mais nous irions directement sur place (Oulan Bator) afin de trouver une agence. Cela implique de rester quelques jours sur place à chercher, je ne sais pas si c’est compatible avec votre timing. Nous concernant, nous mangions la nourriture préparée par la famille la plupart du temps (mais nous avions aussi des provisions que notre guide avait préparé pour le séjour). Bon voyage !

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